Fair-play démocratique : La belle leçon de la classe burkinabè au monde

L'opposition burkinabè unie au sein de la Conférence des candidats signataires de l’Accord Politique de Ouagadougou, lors de sa déclaration le 26 novembre. (Dr)
L'opposition burkinabè unie au sein de la Conférence des candidats signataires de l’Accord Politique de Ouagadougou, lors de sa déclaration le 26 novembre. (Dr)
L'opposition burkinabè unie au sein de la Conférence des candidats signataires de l’Accord Politique de Ouagadougou, lors de sa déclaration le 26 novembre. (Dr)

Fair-play démocratique : La belle leçon de la classe burkinabè au monde

Le 27/11/20 à 16:45
modifié 27/11/20 à 16:45
C’est suffisamment remarquable pour être souligné. Sitôt les résultats provisoires de l’élection présidentielle proclamés le jeudi 26 novembre, l’opposition burkinabè s’engage à n’engager aucun bras de fer qui serait source d’instabilité.

Elle « prend acte des résultats provisoires proclamés par la Ceni », même si elle « se réserve le droit d’utiliser les voies légales de recours pour traiter les irrégularités relevées au cours du déroulement du processus électoral » du scrutin du 22 novembre. « L’opposition politique réaffirme, à l’intention de l’opinion publique nationale et internationale, sa volonté renouvelée de préserver la paix, la stabilité et la sécurité au Burkina Faso en plaçant l’intérêt supérieur de la nation au-dessus de toute autre considération », précise la déclaration lue au siège du chef de fil, Zéphirin Diabré.

Le Pays des hommes intègres a trop souffert des guerres intestines politiciennes. Et ses dignitaires veulent changer d’ère. Tourner la page des clivages.

N’est-ce pas là aussi le but suprême du jeu démocratique ? Hélas, bien souvent, le jeu tue l’enjeu. Et le défi actuel des démocraties modernes pourrait bien être l’acceptation du résultat sorti des urnes. L’actualité, à ce propos, a été riche ces derniers mois.

La tentation du bras de fer fait tache d'huile. Au risque d’entacher les processus électoraux. Dans les rangs des candidats donnés perdants, c’est le même modus operandi : le recomptage des voix.

Le scénario est désormais rodé. Donald Trump, aux Usa; Cellou Dalein Diallo, en Guinée, ont joué à la perfection ce scénario en trois temps. D’abord, le candidat laisse croire que sa victoire est inéluctable. C’est du genre : j’accepterai le résultat des urnes si je suis gagnant. Cette avant-première consiste à préparer l’opinion à l’idée qu’une défaite est impensable et que cela ne peut arriver que s’il y a fraude. Ensuite, dès l’annonce des premiers résultats, on crie précocement victoire.

Roch Kaboré est réélu président du Faso selon les résultats provisoires de la CENI. (Dr)
Roch Kaboré est réélu président du Faso selon les résultats provisoires de la CENI. (Dr)



« Nous sommes forts, mais ils essayent de voler l’élection. Nous ne les laisserons jamais faire. Les votes ne peuvent être déposés après la fermeture des bureaux de vote », tweete Donald Trump, le 4 novembre. Il parle déjà de « grande victoire ». Pourtant, rien n’est encore joué. Le résultat de l’élection présidentielle reste même hautement indécis.

Cellou Dalein Diallo, de son côté, laisse croire à une victoire dès le premier tour avec 53,8 % des voix face au Président sortant, Alpha Condé. « Mes chers compatriotes, malgré les anomalies qui ont entaché le scrutin du 18 octobre et au vu des résultats des urnes, je sors victorieux de cette élection dès le premier tour », lâche-t-il, le 19 octobre, devant la presse au Qg de sa formation, l'Union des forces démocratiques de Guinée (Ufdg), dans la banlieue populaire de Conakry.

Après les phases d’intimidation psychologique, on sort l’arme fatale finale : le recomptage des voix. Ce fameux recours ultime a vu le jour en 2000, lors du duel Bush père-Al Gore.

L'arrêt Bush contre Gore rendu par la Cour suprême des États-Unis, le 12 décembre 2000, va mettre fin aux recours et aux contestations consécutifs à l'élection présidentielle américaine de la même année et aux recomptages des voix en Floride. Il permettra ainsi l'élection de George W. Bush à la présidence des États-Unis. Mais les juges américains furent mis à rude épreuve sur une matière éminemment politique.

20 ans après, Donald Trump a remis le couvert en demandant de recompter les voix dans certains États.

Son équipe de campagne a saisi, à cet effet, les tribunaux de ces États. L’Amérique peut s’en payer le luxe. Elle a pour elle la force de ses institutions, piliers d’une démocratie vieille de plus de deux siècles. Résultat : la machine institutionnelle s’étant mise en branle au pays de l’oncle Sam, le Président sortant et perdant n’a pas eu d'autre choix que de se ranger progressivement.

Guinée-Conakry, Côte d’Ivoire, Mali... on a eu droit, dans la sous-région, à des scenarios de contestation variés dans la forme, mais toujours source d’instabilité.

Il faut espérer que le consensus du voisin burkinabè fasse tache d’huile ! Tout près n’est pas loin. Mais c’est encore loin de nos habitus.



Le 27/11/20 à 16:45
modifié 27/11/20 à 16:45