COVID-19 : Quand les masques sauvent des emplois

Encouragées par le ministère en charge de l’Industrie, les entreprises sont à l’œuvre pour produire des masques barrières. (Poro Dagnogo)
Encouragées par le ministère en charge de l’Industrie, les entreprises sont à l’œuvre pour produire des masques barrières. (Poro Dagnogo)
Encouragées par le ministère en charge de l’Industrie, les entreprises sont à l’œuvre pour produire des masques barrières. (Poro Dagnogo)

COVID-19 : Quand les masques sauvent des emplois

Le 06/05/20 à 09:55
modifié 06/05/20 à 09:55
Rose Mimi Katia est une jeune dame d’environ 30 ans. Elle est employée dans une entreprise de production de matelas située à la nouvelle zone industrielle (Pk 24). Elle faisait partie des employés mis en chômage technique depuis que le pays est en proie au covid-19. En plus d’être stressée par cette maladie, la jeune dame, mère de deux enfants (7 ans et 3 ans), venait de voir ainsi sa source de revenu hypothéquée.

Il y a trois semaines environ, elle a reçu un coup de fil des responsables de la société Afri-Mousse-ci – son employeur – l’informant qu’elle devait reprendre le travail. Arrivée dans les ateliers de l’entreprise, elle remarque qu’une centaine d’autres employés ont été rappelés. Ils sont ravis d’apprendre qu’ils ont l’opportunité de bosser à nouveau parce que l’entreprise a décidé de produire des masques barrières en tissus réutilisables contre le Covid-19.

Depuis donc plus de trois semaines, ses mères et pères de famille ont retrouvé le sourire. à la place des housses pour matelas, ils confectionnent désormais des masques aux normes mises en place par Codinorm.

Maintenant Rose Mimi Katia prie Dieu pour que l’entreprise reçoive des commandes conséquentes. « Nous espérons, surtout, que les autorités de l’état passent commande chez nous », dit-elle, entre autres.

L’entreprise de Rose n’est pas la seule à avoir réorienté ses activités pour produire des masques grand public. On estime à plus du millier les employés (re)mis au travail par le secteur formel (les industriels) grâce à la production de masques.

Tous ces industriels ont le regard tourné vers les pouvoirs publics dans la mesure où l’Etat se présente comme le plus gros acheteur de masques. N’a-t-on pas annoncé une première commande de 130 millions d’unités ?

Le soutien de Souleymane Diarrassouba

A ce propos, les producteurs, semble-t-il, peuvent compter sur le soutien de leur ministre de tutelle. Selon des sources bien introduites au ministère du Commerce et de l’Industrie, Souleymane Diarrassouba se battrait pour qu’ils soient privilégiés. Le ministre Diarrassouba et le directeur général de l’Industrie, Tra Bi Emmanuel, n’hésitent pas à rendre visite aux entreprises qui en produisent. Il s’agit pour la tutelle d’apprécier leur capacité à produire le précieux produit.

Mais le ministère en charge de l’Industrie n’oublie pas d’encourager les uns et les autres à acquérir la certification de Codinorm. Celle-ci vient d’édicter fraîchement les normes en la matière. Certains l’ont déjà obtenue. Et la procédure est en cours pour d’autres.

Pendant ce temps, les fabricants artisanaux, les premiers à avoir produit des masques en tissu, poursuivent leur production. Leurs articles foisonnent dans les rues d’Abidjan.

Les artisans n’en démordent pas

En forte concentration dans la commune d’Adjamé, ils ont été les premiers à coudre les masques en tissu. Chez eux aussi, c’est une question de survie, compte tenu de l’écroulement du niveau de vente des vêtements, leur business de prédilection.

Diallo Salim, confectionneur de prêt-à-porter pour dames, aux abords d’Adjamé-village, s’y est mis depuis une dizaine de jours. Aidé de ses quatre apprentis, il produit, dit-il, mille douzaines de masques par semaine. La matière première est exclusivement « le tissu nylon », précise le tailleur.

Les produits finis sont accrochés à un fil de fer et attendent les grossistes. Prix de la douzaine : 1500 francs Cfa.

à Adjamé, on ne connaît pas Codinorm et ses normes. On fabrique. On vend. Et c’est tout! Mais, il ne faut surtout pas s’ hasarder à interroger ces fabricants sur la qualité de leurs produits. « Nous utilisons des tissus adaptés, notamment en coton. C’est de bonne qualité. Les masques sont lavables et donc réutilisables », explique un autre tailleur, dont l’atelier est situé à une cinquantaine de mètres de celui de Salim Diallo. Il s’appelle Barry Thierno.

Thierno n’est pas le propriétaire de l’atelier. Mais c’est lui qui a en charge la production des masques. Disons que c’est le chef du produit. Il veille, dit-il, à la bonne finition des masques et au rythme de production (30 douzaines par jour). Il brandit un modèle. « C’est le nouveau modèle. C’est le cache-nez africain direct. Il est le plus prisé. Il est très adapté pour les agents des forces de l’ordre. Nous vendons la douzaine à 2500 francs Cfa. », dit-il. Mais il s’empresse d’ajouter que les ventes ne sont plus intéressantes comme début avril. Non seulement le prix du tissu a augmenté, mais aussi il y a trop de concurrence.

« Des gens fabriquent n’importe quoi et vendent à vil prix. Et puis, comme nos clients de l’intérieur du pays ne peuvent plus arriver à Abidjan, les ventes ne pouvaient que baisser », explique-t-il, un peu amer.

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Les stylistes s’en mêlent

Oui. La haute couture ivoirienne, à l’image de la plupart des autres secteurs, n’est pas du tout épargnée par la baisse drastique des activités. Mais nombre de stylistes n’ont pas voulu rester les bras croisés. Depuis deux semaines environ, certains confectionnent aussi des masques anti Covid-19 en étoffe.

Avec eux, le masque n’est pas une simple barrière contre la maladie. C’est aussi un habit... un bel habit. Il ne doit pas rendre laid et surtout laide. « Oui, les femmes doivent rester belles, même derrière le masque », déclare la styliste modéliste Danielle Kréa, bien connue dans le milieu de la haute couture de la sous-région.

Pour les stylistes, le masque contre le Covid-19 doit aussi maintenir l’élégance. (DR)
Pour les stylistes, le masque contre le Covid-19 doit aussi maintenir l’élégance. (DR)



Cette dame dont les ateliers sont à Yopougon fait figure de pionnière en la matière. Elle coupe désormais des « masques stylisés », diraient certains pour rire un peu.

Chez les couturiers, le choix de l’indétrônable pagne des femmes africaines est de rigueur. Le genre et les couleurs sont soigneusement choisis. Rien n’est fait au hasard.

Ils sont beaux. Ils ne rendent pas laid. Ok. Mais « ces masques stylisés » sont-ils fiables contre le Covid-19 ? « Bien sûr qu’ils le sont. Ils ont trois couches. Deux couches en pagne et une en tissu collant faible (la barrière contre les gouttelettes)», affirme-t-elle.

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Les commandes de l’État attendues

Parce que le gouvernement a décidé de soutenir le secteur privé, les producteurs locaux espèrent tous que l’État va les mettre à contribution pour la production de masques barrières. En tout cas, ils en ont la conviction, compte tenu de l’intérêt que leur ministre de tutelle leur montre à travers ses visites dans les usines.

Ce serait un vrai coup de pouce pour les entreprises et les emplois. Les autorités marocaines ont réussi ce coup. Dès le déclenchement de la crise, les dirigeants du royaume, avec à leur tête, le Roi Mohammed VI, ont mobilisé les entreprises locales pour la production de masques.

Les commandes passées immédiatement les ont encouragées à décupler leurs capacités de production. De sorte que les 27 entreprises certifiées ont atteint près de 7 millions d’unités par jour, fin avril. Le ministre marocain en charge de l’Industrie a même annoncé, récemment, un objectif de 8 millions de masques dans un bref délai.

En attendant la reprise économique, voilà donc de quoi mettre sous la dent pour l’industrie marocaine dont le dynamisme a toujours été cité en exemple.

Faut-il le noter, au Maroc, la production des masques est financée par le Fonds Covid-19 mis en place par le Roi.



Le 06/05/20 à 09:55
modifié 06/05/20 à 09:55