Vanité des vanités

Vanité des vanités

Le 02/04/20 à 11:50
modifié 02/04/20 à 11:50
Dans la mythologie grecque, Icare, fils de Dédale, fut enfermé dans un labyrinthe avec son père. Dédale fabriqua à son fils des ailes avec des plumes et de la cire, et ce dernier parvint à s’envoler et sortir du labyrinthe. Mais grisé par le fait d’avoir pu s’envoler, Icare s’approcha de trop près du soleil qui fit fondre la cire qui maintenait les ailes à son corps. Pourtant son père lui avait expressément demandé de ne pas trop s’approcher du soleil. Icare tomba alors dans la mer et mourut. Ce mythe peut être interprété comme le désir de l’homme de toujours repousser le champ de ses connaissances, de ses possibilités, au risque de franchir des barrières qu’il n’aurait pas dû, et d’en payer le prix fort. Parce qu’il avait réussi à voler comme un oiseau, Icare a bravé l’interdiction de trop s’approcher le soleil. Il l’a fait et s’est littéralement brûlé les ailes.

N’est-ce pas ce que l’homme moderne a fait de nos jours ? Il n’a jamais cessé de repousser les limites de ses connaissances et de sa curiosité, explorant aussi bien l’infiniment petit que l’infiniment grand. L’homme est allé jusqu’aux confins de l’univers, au cœur des particules les plus microscopiques, au fond des océans, à l’assaut des planètes les plus éloignées, il a posé des engins sur des astéroïdes gravitant à des milliards de kilomètres de nous, et fracturé les atomes pour en faire des armes monstrueuses capables de détruire totalement la terre...

Vanité des vanités. L’homme n’a-t-il pas fini par se prendre pour un dieu ? Sans doute, mais un dieu malfaisant, puisque dans le même temps, il s’est ingénié à détruire la nature et les autres êtres vivants qui partagent la terre avec lui. Il a fait disparaitre des milliers d’espèces d’animaux, d’oiseaux, d’insectes, parfois, juste pour le plaisir de les faire disparaître. Ainsi organise-t-il des safaris qui permettent à des individus fortunés d’aller tuer des animaux, non pas pour se nourrir, mais simplement pour le plaisir de faire des photos à côté de leurs cadavres. Il a abattu des millions d’arbres, fait disparaître des forêts, tout en n’ignorant rien de l’utilité, pour sa propre survie, de ces arbres et de ces forêts. Il a pollué toutes les mers du globe et la plupart des rivières et fleuves qui lui fournissent l’eau qui lui sert pour étancher sa soif, pour se laver, faire la vaisselle, la lessive, arroser les plantes qui lui permettent de se nourrir, et les poissons nécessaires à son alimentation. En maints endroits du globe, même en Côte d’Ivoire, de nombreux cours d’eau sont pollués par les produits utilisés par les orpailleurs. L’homme comprendra-t-il un jour que l’or ne se mange pas et ne se boit pas ? Lorsqu’il ne fait pas disparaître certains animaux, ils doivent servir à sa consommation ou à son plaisir. Il les transforme alors afin qu’ils produisent le plus de viande, de lait, d’œufs ou de foie gras qui lui feront gagner le plus d’argent. Ainsi les veaux, vaches, moutons, cochons, poules, canards, oies, sont-ils engraissés avec des méthodes qui ressemblent à de la torture, au mépris de tout ce que ces animaux peuvent endurer comme souffrance. Le réchauffement de la planète du fait des activités industrielles de l’homme fait fondre la glace des pôles et remonter le niveau de la mer, menaçant ainsi de nombreuses villes côtières et même la vie sur terre. Mais nous n’en avons cure.

Par le génie biologique, l’homme est arrivé à modifier la forme de certains organismes, de certaines créatures telles que des souris, à les croiser avec d’autres animaux de manière à créer des êtres hybrides. Aujourd’hui, des chercheurs tentent de ressusciter des espèces éteintes telles que les dinosaures, les mammouths ou même l’homme du Neandertal. L’homme moderne est déjà arrivé à créer des êtres humains qui mêlent des parties organiques et inorganiques, ceux que l’on appelle les cyborgs. Ainsi, des personnes ayant perdu des membres peuvent-ils se voir greffés des bras ou des jambes bioniques actionnés par la pensée. Oui, l’homme a fini par se prendre pour un dieu. Vanité des vanités.

Lisons ces dernières lignes de « Sapiens » le célèbre livre de l’Israélien Yuval Noah Harari : « des canoës nous sommes passés aux galères puis aux vapeurs et aux navettes spatiales, mais personne ne sait où nous allons. Nous sommes plus puissants que jamais, mais nous ne savons trop que faire de ce pouvoir. Pis encore, les humains semblent plus irresponsables que jamais. Self-made-dieux, avec juste les lois de la physique pour compagnie, nous n’avons de compte à rendre à personne. Ainsi faisons-nous des ravages parmi les autres animaux et dans l’écosystème environnant en ne cherchant guère plus que nos aises et notre amusement, sans jamais trouver de satisfaction. Y a-t-il rien de plus dangereux que des dieux insatisfaits et irresponsables qui ne savent pas ce qu’ils veulent ? »

Vanité des vanités. L’homme a-t-il fini par dépasser les bornes ? Aujourd’hui, partout sur cette terre qu’il était en train de détruire, l’homme tremble. Devant quoi ? Devant un virus, un organisme si minuscule qu’il est invisible à l’œil nu. Est-ce l’homme qui l’a lui-même imprudemment créé ? A-t-il essayé de manipuler un virus déjà existant ? Est-ce le créateur de l’homme et de l’univers à qui l’on peut donner tous les noms que l’on veut qui le lui a envoyé pour le châtier de sa témérité ? Et pendant que nous nous calfeutrons, la nature que nous avons tant maltraitée est en train de reprendre ses droits en maints endroits de la planète. Méditons tout cela.

Venance Konan


Le 02/04/20 à 11:50
modifié 02/04/20 à 11:50