Henri Koula (proviseur du lycée scientifique de Yamoussoukro): «La réhabilitation du lycée n’est pas un leurre»

Henri Koula, proviseur du lycée scientifique de Yamoussoukro. (DR)
Henri Koula, proviseur du lycée scientifique de Yamoussoukro. (DR)
Henri Koula, proviseur du lycée scientifique de Yamoussoukro. (DR)

Henri Koula (proviseur du lycée scientifique de Yamoussoukro): «La réhabilitation du lycée n’est pas un leurre»

Le 29/01/20 à 10:54
modifié 29/01/20 à 10:54
Après plusieurs années de délabrement, le lycée scientifique de Yamoussoukro va retrouver son lustre d’antan, grâce à un projet de réhabilitation qui débute sous peu. Et qui permettra à ce moule d’excellence de jouer pleinement son rôle de fournisseur d’élèves excellents pour les grandes écoles de l’Inp-hb.
Monsieur le proviseur, en dehors du délabrement du lycée, c’est le gymnase qui part en fumée. Quel commentaire ?
C’est un vrai pincement au cœur de voir ce lycée et surtout le gymnase partir en lambeaux, pour nous qui connaissons cette école pour y avoir fait nos études. Je suis plus triste encore quand je lis les quelques lignes écrites de la main du Président Félix Houphouët-Boigny, à l’occasion du baptême de la première promotion. Il disait avoir construit ce lycée avec amour pour les enfants de Côte d’Ivoire qui devront demain être les meilleurs. Tout cela est en train de partir petit à petit en lambeaux. Et j’avoue que ça fait vraiment mal au cœur.

Mais le gymnase était à l’abandon depuis longtemps.

Oui, il était à l’abandon depuis très longtemps. Il était même fréquenté par des personnes peu recommandables. Et nous l’avons signalé depuis longtemps à la police. On se demande même si ce ne sont pas ces individus peu fréquentables-là qui ont mis accidentellement le feu à la bâtisse.

Au-delà des résultats toujours excellents, tout le monde sait que le lycée scientifique est à l’agonie en ce qui concerne les infrastructures. Qu’est-ce qui explique cette situation?

Le lycée scientifique de Yamoussoukro va très bien au plan des résultats et du fonctionnement. Les cours se déroulent très bien. Nous nous sommes mis à l’abri de toutes les perturbations. En 2018-2019, nous avons enregistré nos pires résultats parce que nous étions autour de 92% au baccalauréat. En 2017-2018, nous étions à 99%. Mais cette année, nous comptons relever ce chiffre parce que nous avons fait le diagnostic. Nous avons identifié le problème et nous sommes en train de le corriger. Et donc je pense qu’on va avoisiner les 100% cette année. Je ne suis pas fier de le montrer, c’est vrai. Il est délabré mais nous avons quand même le minimum pour travailler. L’État fait ce qu’il peut pour nous mettre à disposition le minimum. L’internat fonctionne très bien. C’est l’un des gages de notre réussite. Même si la trésorerie est de plus en plus fragile. Mais c’est partout en Côte d’Ivoire, ce n’est donc pas spécifique au lycée scientifique. On arrive à nous en sortir.

Outre les mécènes constitués en majorité d’anciens élèves qui viennent en renfort à leur lycée, avez-vous des raisons d’espérer en des lendemains meilleurs ?

Oui, on a toujours décrié l’État de délabrement très avancé du lycée scientifique de Yamoussoukro. Ce qui est vrai. Mais il faut dire que le gouvernement n’est pas resté les bras croisés, parce qu’il y a un plan de réhabilitation qui est imminent. Depuis le courant de l’année scolaire passée, des missions de l’Agence française de développement (Afd), du ministère de tutelle et du Contrat de désendettement et de développement (C2d) sont venues sur place, ici, pour lancer la phase administrative de la réhabilitation. Nous avons, à cet effet, participé à plusieurs ateliers de réflexion. Cette phase est donc terminée. On nous a même demandé, à cette occasion, d’écrire un nouveau projet du lycée scientifique. Ce qui voudrait dire ce que nous comptons faire du lycée scientifique, une fois réhabilité, pour que les bâtiments non utilisés ne soient pas délabrés du fait de leur non-affectation. Nous avons, à l’occasion, formulé le vœu que les classes préparatoires soient désormais logées au sein du lycée, comme cela se fait dans les autres établissements que nous avons eu la chance de visiter à travers plusieurs missions, notamment au lycée Louis Le Grand à Paris. Et nous nous sommes aperçus que les classes préparatoires sont logées dans les lycées. Donc nous avons écrit ce projet et la partie administrative est achevée. A la suite, nous avons eu encore une autre heureuse initiative. C’est que, après la mission de l’Afd pour laquelle les travaux vont débuter très bientôt, il y a une autre mission de la Présidence de la République qui est venue pour une mission portant sur un fonds qui aurait été prévu pour la réhabilitation du lycée. Cette 2e mission, nous l’avons dirigée vers les autres parties qui n’ont pas été prises en compte par la première mission. Notamment la cité blanche qui est partie intégrante du lycée scientifique, ainsi que les résidences d’astreint du personnel du lycée. C’est pour dire, en conclusion, que la réhabilitation du lycée n’est pas un leurre. Parce que la partie administrative est achevée. Incessamment donc, nous allons entamer la phase pratique. Mais je crois que la hiérarchie est en train de réfléchir sur la délocalisation des deux lycées logés au sein du lycée scientifique. Il s’agit des lycées mixte 1 et 2 de sorte à libérer l’espace pour que commencent les travaux. Et ça aussi, c’est imminent parce qu’une source me permet de vous dire qu’il y a deux sites retenus pour ces deux lycées. Il y a un à Logbakro et l’autre à Séman. Ensuite, une autre heureuse nouvelle, c’est qu’une mission de l’inspection générale qui est passée il y a une semaine, m’a demandé de penser à l’ouverture de l’internat du lycée à la veille de la rentrée scolaire, comme cela se faisait à l’origine. Cette réflexion est également achevée et nous avons communiqué à notre hiérarchie, comment nous pouvons ouvrir l’internat la veille de la rentrée scolaire. Cela n’est pas très difficile d’ailleurs. Donc, je rassure tout le monde pour dire que la réhabilitation du lycée est lancée. Elle est irréversible.

A quelles classes préparatoires faites-vous allusion ? Celles de l’Institut national polytechnique Houphouët-Boigny de Yamoussoukro (Inp-hb) ?

En son temps, le directeur général de l’Inp-hb, Koffi N’guessan, m’avait approché pour voir comment il pouvait loger les classes préparatoires ici pour libérer de l’espace pour accueillir un peu plus d’élèves ingénieurs. Donc je crois que les classes préparatoires seront logées ici pour certainement être préparées pour les grandes écoles de l’Inp-hb. Cela est prévu juste après la fin de la réhabilitation. C’est le lycée scientifique nouveau.

Mais à quand situez-vous le début des travaux ?

Les travaux sont prévus pour débuter dans les mois à venir. Je ne peux pas vous donner une date exacte. Sauf la ministre peut le savoir. Par contre, je pense que les choses ne vont pas tarder.

Peut-on avoir une idée du coût des investissements que l’État va consentir?

Je n’ai aucune idée du coût estimatif, mais je sais que ça va être beaucoup d’argent.

Que mettez-vous dans la partie administrative dont vous parliez tantôt ?

Effectivement, la partie administrative concerne l’ensemble des réflexions, des différentes études qui ont été menées par le C2d, ensuite la conception même du nouveau lycée scientifique pensé avec l’aide de l’inspection générale qui a associé l’Inp-hb aux réflexions. Puisque après tout, nous produisons ici au lycée scientifique pour l’Inp-hb. Donc, il faut qu’ils nous donnent le profil d’élèves qu’il leur faut. C’est d’ailleurs ce qui m’a valu d’effectuer de nombreux voyages à l’extérieur pour voir comment l’on peut obtenir le profil d’élèves capables de compétir pour les grandes écoles à l’étranger. Donc c’est tout cela que j’appelle la partie administrative.

Pour revenir aux deux lycées mixtes 1 et 2 qui devront être délocalisés sur les sites précités, s’agira-t-il de construire de nouveaux lycées dans ces villages ?

A mon avis, oui. Ce sont des sites qui ont été déjà choisis et sur lesquels, il n’y a rien. Donc, si on doit délocaliser, il s’agit de construire de nouveaux locaux pour abriter ces deux lycées.

En dehors de la commune, les problèmes de déplacement ne vont-ils pas surgir?

Pas forcément en dehors de la ville, mais aux extrémités de la ville, pour les mettre à l’abri des bruits et mouvements des voitures. Il s’agit de leur offrir un cadre propice aux bonnes études.

Je pense donc que le problème de déplacement ne va pas se poser. La ville s’étend chaque jour. On a toujours tendance, en Côte d’Ivoire, à dire que c’est en brousse; et au bout de quelques temps, on se retrouve en pleine ville, avec des bruits et nuisances sonores diverses. Je crois que pour loger des établissements de cette envergure, il faut les mettre à l’abri des bruits et des mouvements des véhicules. J’estime, pour ma part, que les sites ont été bien choisis.

Ces lycées vont-ils être aussi dotés d’internats comme au lycée scientifique ?

Non, je ne le pense pas. Parce que la tendance aujourd’hui, ce n’est pas à la réouverture des internats, même si c’est le souhait de la ministre. Parce qu’il y a aussi un coût. Je suis sûr que le citoyen lambda n’en a aucune idée. Mais le lycée scientifique qui a 1000 élèves, revient à 900 millions FCfa par an. L’État ne peut pas s’offrir le luxe d’ouvrir des internats dans tous les lycées. Ce n’est pas possible.

M. le proviseur, certaines langues indiquent que la proximité du lycée scientifique avec le nouveau stade en construction, juste en face, n’est pas un atout favorable à des études sereines pour les élèves. Avez-vous des inquiétudes à ce niveau ?

Croyez-moi, nous ne nous rendons même pas compte que des travaux se font à côté de nous. Ces travaux ne gênent nullement les cours. C’est lorsque je passe devant le chantier pour rentrer au lycée que je réalise qu’ils sont là, puisqu’il n’y a pas de bruits gênants. Maintenant quand on me dit qu’après la fin des travaux, les matches vont occasionner du bruit, je dis non. Parce que les matches se jouent les week-ends. Et les week-ends sont des moments où les élèves sont relax. Je ne vois donc pas en quoi la présence d’un stade va gêner le fonctionnement d’un lycée. En Europe où il n’y a pas autant d’espaces libres qu’ici, les stades se trouvent en pleine ville et pourtant, cela ne gêne en rien les établissements. Pour moi, ce n’est pas un sujet sur lequel il faut s’étendre. Je voudrais profiter pour dire merci au peuple de Côte d’Ivoire et je le rassure que le Président de la République, le Premier ministre et notre ministre de tutelle font de l’avenir du lycée scientifique de Yamoussoukro, une préoccupation quotidienne. C’est pourquoi, je me permets d’affirmer avec force que le lycée scientifique de Yamoussoukro ne mourra pas. Cela est d’autant vrai que bientôt, il retrouvera son lustre d’antan grâce au projet de réhabilitation décidé par le Président Alassane Ouattara. Quant à nous, grâce à notre ministre de tutelle, nous continuerons à garantir l’excellence au sein de ce lycée dont les fruits continuent d’être courtisés par nombre de grandes écoles supérieures à l’extérieur du pays, parce que nos produits sont bons. Et je suis convaincu qu’avec la réhabilitation, nos résultats seront encore meilleurs.

N’DRI CÉLESTIN


Le 29/01/20 à 10:54
modifié 29/01/20 à 10:54