Musique : ‘’Bégnansou Moayé’’, l’album testament d’Allah Thérèse

Maman Allah Thérèse. (DR)
Maman Allah Thérèse. (DR)
Maman Allah Thérèse. (DR)

Musique : ‘’Bégnansou Moayé’’, l’album testament d’Allah Thérèse

Le 20/01/20 à 17:16
modifié 20/01/20 à 17:16
La doyenne de la musique ivoirienne, Allah Thérèse, en présentant ‘’Bégnansou Moayé’’ (ce qui procure du bonheur), son dernier opus le 19 juillet 2019, à la Maison de la presse, au Plateau, avait fait savoir que ce serait le dernier de sa carrière. Elle n'a pas eu l'occasion de s'illustrer au rythme de ce bonheur sonore.

Il n'empêche, cet album reste pour la postérité comme le testament discographique de celle qui, depuis le début de sa carrière en 1956, a marqué les esprits par sa personnalité, sa musique et son originalité. Allah Thérèse, c’était aussi 63 ans de complicité avec son époux et compagnon musical de tous les jours : N’Goran "La loi", virtuose de l’accordéon, décédé le 20 mai 2018. Le jour de la présentation officielle de son album testament, l’émotion était à son comble.

Allah Thérèse n'a pas pu chanter en l'absence de son compagnon. C’était la première fois qu’elle jouait sans son époux. Elle pleurait et avait la voix étreinte par l’émotion. La chanteuse n'a pas pu interpréter ses chansons et exécuter ses célèbres pas de danse. C'était sans doute un signe qu'elle n'arriverait pas à se passer de son mari. En tout cas, la difficulté de l'artiste à chanter en disait long sur les liens qui l'unissaient à N'Goran "La loi".

A peine une année après le décès de son époux, et six mois après la sortie de ‘’Begnansou Moayé’’, la faucheuse, cruelle, est venue arracher, Allah Thérèse, à l’affection des siens. Et pourtant, rien ne présageait une telle issue. Elle fut admise, dans la matinée pour un mal bénin à la mâchoire, au soir du 19 janvier (23H10) à l’Hôpital général de Djakanou. Celle qui a été faite chevalier dans l’Ordre du mérite ivoirien en 2012 a rejoint son époux et complice, N’Goran La loi, au paradis céleste, pour vivre unis dans l’éternité.

Sa coiffure, appelée ‘’Akôrou Koffié’’ (la femme de l'araignée), sa musique l’Agbirô, ses pas de danse, ses décalages, ses pirouettes comparables à la démarche de la perdrix de la savane baoulé, resteront à jamais gravés dans les mémoires au moment où Allah Thérèse nous quitte à 84 ans.

L’histoire de l’album de fin de carrière d’Allah Thérèse commence en 2016. « A la fin d’une soirée en son honneur en 2016, Maman Allah Thérèse m’a confié son désir d’arrêter la scène. Pour ce faire, elle m’a demandé de produire son dernier album qui mettra ainsi fin à sa carrière mais aussi pour dire un grand merci à la nation ivoirienne qui, de tout temps, a été à ses côtés, l’a tant aimée et a fait d’elle ce qu’elle est aujourd’hui. C’est ainsi qu’en mai 2017, elle rentre en studio pour enregistrer 10 chansons.

Le travail technique, les formalités administratives au Burida nous ont conduits jusqu’en 2018. Au moment de la sortie de l’œuvre, la mort est venue ôter à notre affection, son époux N’Goran La loi. Après un an de veuvage, nous avons décidé de sortir le dernier album de la carrière d’Allah Thérèse », raconte Augustin N’Dri, producteur de l’album.

Dans les chansons de cet ‘’album testament’’, Allah Thérèse évoque des vertus telles que l’union, l’amour entre les peuples, l’amour entre les conjoints qui débouche sur la complicité et la sincérité dans toute relation. ‘’Fondi’’, une reprise (la paix), est toujours présent pour parler de la paix, préalable au développement de la Côte d’Ivoire tel qu’impulsé par le président Félix Houphouët-Boigny.

Dans un autre titre, elle témoigne sa reconnaissance à Dieu, aux Ivoiriens, aux autorités politiques et administratives, coutumières et religieuses, avec à leur tête le Président de la République Alassane Ouattara. « J’ai demandé à Dieu de m’aider à réussir dans la chanson afin que n’ayant pas fait d’enfant, ce soit tous les enfants de Côte d’Ivoire qui me portent en terre le jour de ma mort », a-t-elle plaidé dans la chanson ‘’Bégnansou Moayé’’.

C'est également un album pour manifester toute l’affection de la Nation ivoirienne à la doyenne de la musique ivoirienne. La Nation d’ailleurs qu'elle envisageait de remercier par une grande tournée nationale qui devait connaître son apothéose par un grand concert au Palais de la culture d’Abidjan Treichville. Hélas, la mort en a décidé autrement.

Repose en paix Mémé, Maman, l’Artiste, digne fille de Gbofia dans la sous-préfecture de Toumodi ! Comme on le dit, les artistes ne meurent jamais !

Serges Nguessant


Le 20/01/20 à 17:16
modifié 20/01/20 à 17:16