Législatives en Guinée/Cellou Dalein Diallo : « Il n’y aura pas d’élections sans nous »

Cellou Dalein Diallo, Président de l’UFDG et Chef de file de l’Opposition en Guinée
Cellou Dalein Diallo, Président de l’UFDG et Chef de file de l’Opposition en Guinée
Cellou Dalein Diallo, Président de l’UFDG et Chef de file de l’Opposition en Guinée

Législatives en Guinée/Cellou Dalein Diallo : « Il n’y aura pas d’élections sans nous »

Le président de l’UFDG et Chef de file de l’Opposition en Guinée a adressé une tribune aux médias pour exprimer sa position sur les élections législatives en Guinée. Nous vous la proposons.
« À un mois des élections législatives, nous sommes déterminés à faire barrage à la mascarade électorale qu’Alpha Condé prépare. Reportées à plusieurs reprises depuis 2018 par un Président sorti affaibli des communales du 4 février 2018, ces législatives ne sont organisées que pour une seule raison : octroyer les 2/3 des sièges au parti présidentiel (RPG-arc-en-ciel) grâce à une fraude institutionnalisée, afin de légitimer à l’avance la victoire du Oui au référendum sur la nouvelle Constitution, elle même devant permettre à Alpha Condé de briguer un troisième mandat illégal, au terme de son second et dernier mandat.

Le hold-up électoral que nous redoutions tant est en cours. Au lieu des trois mois prévus par le Code électoral pour la révision des listes, le président de la CENI impose un délai de 25 jours, nettement insuffisant pour cette révision extraordinaire par son ampleur. Elle devrait, en plus des opérations classiques, permettre à tous les électeurs déjà inscrits au fichier de se faire enrôler de nouveau, conformément à la recommandation de la mission d’audit réalisé en 2018 par l’Organisation internationale de la Francophonie, l’Union européenne et les Nations Unies.

Il existe aussi une discrimination flagrante organisée par la CENI et l’administration locale entre les fiefs du pouvoir et ceux de l’opposition, aussi bien dans la distribution du matériel et des consommables, que dans l’organisation pratique des opérations. Dans les fiefs du pouvoir, les règles et les procédures édictées ont été régulièrement violées pour faciliter l’enrôlement des électeurs, et hélas, de nombreux mineurs. À l’inverse, dans les fiefs de l’opposition, de nombreux citoyens jouissant pleinement de leur droit de vote en Guinée et à l’étranger, continuent d’être arbitrairement exclus du fichier, donc des élections.

Cette pratique discriminatoire, à l’oeuvre depuis l’arrivée d’Alpha Condé au pouvoir, est à l’origine des nombreuses anomalies statistiques constatées au niveau du fichier électoral guinéen. Après sa récente révision, il compte selon le président de la CENI, quelque 8,3 millions d’électeurs sur une population estimée à 12,2 millions de Guinéens. Notre corps électoral représenterait donc aujourd’hui 68% de la population, alors que ce ratio n’atteint nulle part 42% dans toute la sous-région !

Au Sénégal, le Président de la CENI et l’Ambassadeur de Guinée à Dakar ont tout simplement décidé d’annuler la révision dans ce pays limitrophe qui compte plus d’un million de guinéens, qui y votent habituellement à 90% pour l’opposition.

L’audit mené en 2018 par l’OIF, l’UE et l’ONU avait révélé l’existence de graves anomalies dans le fichier électoral, qui devaient être corrigées à l’occasion de cette révision. Pour doter la Guinée d’un fichier biométrique homogène, la mission avait fortement recommandé qu’à l’occasion de cette révision, tous les électeurs reviennent se faire enrôler correctement, sous peine d’en être radiés.

Sans surprise, face aux réticences du parti au pouvoir le président de la CENI a finalement refusé d’appliquer cette consigne, malgré l’insistance de l’OIF et les engagements pris en ce sens. Sur les 8,3 millions d’électeurs du fichier de 2019, plus de 3 millions ne se sont pas présentés pour se faire ré-enregistrer et devraient donc être exclus du corps électoral. Ils y ont pourtant été maintenus par le président de la CENI, comptant ainsi parmi les électeurs qui seront appelés à voter lors des prochaines élections.

En violant à plusieurs reprises son serment et le Code électoral, le président de la CENI, Maître Salif Kébé, a révélé son manque d’indépendance, d’impartialité et d’honnêteté. Il a défendu un chronogramme irréaliste, en fixant, en dehors du délai légal, la date de dépôt des candidatures pour les législatives. Au regard de la loi, tous les candidats à cette élection sont forclos. Monsieur Kébé a ainsi perdu la confiance et la légitimité nécessaires pour diriger l’Organe de gestion des élections et pour en être membre.

La vocation naturelle d’un parti politique et de tout homme politique engagé est de participer aux élections, à la condition néanmoins qu’elles soient transparentes, libres et démocratiques. Le refus de l’Opposition de participer à la mascarade électorale annoncée relève d’une démarche d’anticipation et de prévention de violences politiques et de conflits liés aux élections. Les conséquences potentiellement déstabilisatrices qui en découleraient, aussi bien pour la Guinée que pour la sous-région, dans un contexte déjà fragile, doivent à tout prix être évitées. C’est donc à la source que le problème doit être traité, en concentrant tous nos efforts d’abord sur l’assainissement du fichier électoral et le respect des délais légaux pour la révision des listes électorales et pour le dépôt des candidatures. Ensuite, les élections locales doivent être parachevées conformément à la décision de la Cour suprême. Enfin, il faut que l’organe de gestion des élections soit dirigé par un homme compétent, neutre, et impartial.

Il est de ma responsabilité, en tant que chef de file de l’opposition et citoyen guinéen soucieux de la préservation de la paix, de la stabilité et des acquis démocratiques, d’exiger que le processus électoral en cours soit juste, consensuel et conforme aux principes et aux règles de l’État de droit et de la démocratie.

C’est l’avenir de la démocratie et de la liberté dans notre pays qui est en jeu. C’est une exigence de nos électeurs et de tous les citoyens guinéens qui sont déterminés pour défendre leur Constitution, comme ils l’ont prouvé par leurs manifestations grandioses contre le projet de troisième mandat d’Alpha Condé.

Cellou Dalein Diallo, Président de l’UFDG et Chef de file de l’Opposition en Guinée